Amateur d'insolite et Scribe des Miracles
15 mai 2008(Formule écrite au bas de son nom sur ses cartes de visites).
Dans Les aventures de Tintin - Tome 22 - "Vol 714 pour Sidney" (Hergé, Casterman) Hergé caricature Jacques Bergier et lui donne le rôle de Mik Ezdanitoff, écrivain de la revue Comète, mais aussi télépathe et agent de liaison avec les extraterrestres.
(L'image est tirée de la page 45, case 7).
En lui donnant ce rôle, Hergé fait référence: à son amour de la Science-Fiction (qui pour lui, n'etait pas seulement un loisir, mais une manière de penser et de comprendre le monde, une préfiguration de ce qui attendait l'humanité) ; mais aussi à ses croyance assez farfelues sur la divination, et les petits hommes verts entre autre (Dans Le Matin des magiciens et dans la plupart de ses autres ouvrages, Bergier suppose l'existence d'extraterrestres. Il cite plusieurs phénomènes comme preuve de leur réalité, notamment la présence de traces de ventouses sur les montagnes). La revue "Comète" citée dans BD fait allusion au véritable magazine Planète dans il est le créateur. Son nom dans l'album, -Ezdanitoff-, est une expression contractée tirée du patois marollien -Is dat niet tof ?-, qui peut se traduire par -C'est pas beau ça ?-.
Jacques Bergier (1912-1978) était un ingénieur chimiste, alchimiste, espion, journaliste et écrivain franco/polonais d'origine Ukrainienne. De famille juive, c'est un enfant surdoué qui se signale très tôt (2 ans) par une capacité de lecture gargantuesque dans plusieurs langues (Il a lu de 4 à 10 livres par jours tout du long de sa vie). En 1920, la Russie connaît la guerre civile, la famille décide d'émigrer vers la Pologne puis la France. A Paris, il passe les baccalauréats section sciences et philo en 1930, et réussit le concours d'entrée à l'Institut de Chimie. Il s'inscrit en même temps à la Sorbonne pour divers certificats de mathématique et de chimie. Et il continue d'alimenter sa boulimie de lecture avec les plus grands noms du fantastique et de la SF américaines.
En 1936, un ami ingénieur chimiste, finance la mise sur pied de leur laboratoire où ils travaillent sur des produits pour le tissage. Parallèlement, Bergier s'intègre à l'équipe de chimie-physique d'Hellbronner pour des travaux de physique nucléaire. Il découvre l'utilisation de l'eau lourde pour le freinage des neutrons et réalise la première synthèse d'un élément radioactif naturel, le polonium.
Antinazie militant, il soutient le parti communiste allemand. Pendant la Seconde guerre mondiale, il transmettait également des rapports sur l'utilisation de l'énergie atomique aux gouvernements américains et français, ce qui l'engage progressivement au sein des services secrets alliés. Ses activités de résistant en France sont multiples: laboratoires clandestins pour la fabrication de bombes, d'émetteurs radio, de dispositifs d'écoute téléphonique, de fausses monnaies et faux papiers... Il fait éditer à Londres un Manuel du parfait saboteur, traduit en 38 langues. En 1944 il est déporter et subit de nombreuses tortures. Après la guerre, il reçoit les plus hautes distinctions militaires russes, anglaises, des américaines et des françaises.
Dans les premiers temps, il s'occupe d'organiser la DGER, de la poursuite des criminels de guerre, d'espionnage et de contre-espionnage, de la recherche de secrets militaires. Il demande à de Gaulle de créer le Commissariat à l'Energie Atomique.
Il dit avoir ramené deux pouvoirs paranormaux des camps. Le premier dont il se débarrassera rapidement est de pouvoir deviner de quoi les gens ont faim. Le second est de savoir avec certitude quand il est suivi (il jouit également d'un don olfaction exacerbée).
Bergier est également connu pour ses positions sur l'alchimie. Dans le milieu des années 50, il rencontre Louis Pauwels. Une grande amitié naît entre eux, ce qui conduit à la rédaction du fameux Matin des Magiciens, publié chez Gallimard en 1960. Dans la foulée de ce livre, Pauwels et Bergier lancent la revue Planète afin de combler l'attente des milliers de lecteurs.
Jacques Bergier meurt seul, pour la seconde fois, le 23 novembre 1978. Comme il l'avait dit lui-même, il était mort une première fois le 23 novembre 1943, jour de son arrestation à Lyon: "En voyant la Gestapo arriver, j'ai cru ma vie finie. Elle ne faisait en fait que débuter. Je devais sacrifier au rite du passage, mourir et renaître comme dans la légende. Telle l'âme nouvellement libérée qui commence son lent voyage à la rencontre du Visage juste, j'avais encore beaucoup à apprendre.".
PS: En 2002 a été créé le Prix Jacques Bergier qui récompense des ouvrages de science-fiction et de fantastique.
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