Sensationnalisme
12 mars 2024Du journalisme bidon, en dessous de la ceinture, voilà ce que c'est !
Jacob Q. Boot interprété par Porter Hall | Le Gouffre aux chimères
Le Gouffre aux chimères de Billy Wilder (1951).
Tyler Cross - Vintage and Badass de Brüno et Fabien Nury (Page 36).
Dans le hors-série Vintage and Badass: Le cinéma de Tyler Cross (Brüno et Nury • Dargaud) Brüno Thielleux pastiche un plan du film Le Gouffre aux chimères de Billy Wilder sur une planche de la BD. On reconnait très bien la caricature et la posture de Charles Tatum interprété par Kirk Douglas à la sauce Tyler Cross.
Le Gouffre aux chimères est un long métrage américain réalisé par Billy Wilder et sorti dans les salles obscures le 4 juillet 1951. A l'origine, le titre du film en VO était Ace in the hole, littéralement: Un atout dans la manche, mais après les très mauvaises critiques parues dans la presse lors de la sortie du film, la Paramount décida de changer le titre en The big carnival: Le grand Carnaval.
Charles Tatum (Kirk Douglas), journaliste sans scrupules, va exploiter un scoop. Au Nouveau-Mexique, Léo Minosa (Richard Minosa), un Indien, est coincé au fond d'une galerie effondrée. S'arrangeant pour être le seul journaliste sur le coup, il va persuader le shérif (Ray Teal) de choisir la formule de sauvetage la plus lente. Tatum va devenir l'amant de la femme de la victime (Jan Sterling) et poussera l'hypocrisie jusqu'à devenir l'ami de Léo.
AlloCiné | Le Gouffre aux chimères
Premier film de Billy Wilder en tant que producteur, Le Gouffre aux chimères a été un échec financier et artistique complet pour le réalisateur. Non seulement, le film est rejeté par le public mais, les dirigeants de la Paramount, voulant ressortir immédiatement le film pour en faire un succès, le remixent et le remontent, en changeant même la musique. Si à l'époque, Wilder veut quitter la firme, il considéra plus tard ce film comme l'un de ses préférés.
Ce qui frappe dans Le Gouffre aux chimères, c'est l'équilibre redoutable qui se forme entre un traitement d'une réalité tout à fait lucide et amer, et l'impression troublante d'assister à une farce macabre. Des diablotins sinistres dansent joyeusement autour de leurs victimes, tandis que des clowns lugubres s'entredévorent avec enthousiasme. C'est une représentation de l'enfer sur Terre, d'autant plus effrayante que seuls des comportements que l'on qualifierait volontiers de quotidiens, voire naturels, y sont finalement dépeints. Les termes "cirque" ou "carnaval médiatique", aujourd'hui largement utilisés, n'étaient pas encore en vogue dans les années 50. C'est la modernité de la définition que Wilder offrait déjà à l'époque qui fait du Gouffre aux chimères une œuvre visionnaire. Elle a été mal comprise à sa sortie, mais le temps n'a fait qu'intensifier la virulence et la pertinence de son message.
En toute franchise, à l'époque, on accusait Wilder d'avoir poussé les choses trop loin. Cependant, aujourd'hui, la réalité a largement dépassé la fiction. Il est désormais possible d'assister quotidiennement à des spectacles médiatiques de ce genre sans le regard critique de l'artiste, sans sa distance qui devrait normalement éveiller notre vigilance. Ces événements viennent continuellement satisfaire notre voyeurisme morbide.
Malgré une certaine estime pour le film allant croissante du côté européen de l'Atlantique, ce n'est que dans les années 80 que la réputation du Gouffre aux chimères s'améliora aux Etats-Unis, jusqu'à être considéré désormais comme l'une des plus grandes réussites de l'auteur.
PS: Pour avoir plus d'informations sur ce film, je t'invite à regarder »cette critique« de l'excellente chaîne YouTube: Le ciné-club de M. Bobine.
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