No Sub's Land
29 oct. 2025Cela me rappelle les jours glorieux du Spoutnik et de Youri Gagarine, quand le monde tremblait devant le rugissement de nos fusées. Eh bien, il tremblera encore, terrifié par notre silence.
Cpt. Marko Ramius interprété par Sean Connery | A la poursuite d'Octobre Rouge
A la poursuite d'Octobre Rouge de John McTiernan (1990).
No Man's Land #1 de Szymon Kudrański (Couverture bis).
Dans le comic book No Man's Land #1 (Kudrański • Image Comics) Szymon Kudrański parodie l'affiche du film A la poursuite d'Octobre Rouge de John McTiernan sur une des couvertures alternatives de sa BD. Ici, le capitaine Marko Ramius commandant de l'Octobre Rouge interprété par Sean Connery est remplacé par l'agent du FBI Kevin Collins.
Mettez votre bonnet, prenez une grande inspiration et préparez-vous à une descente dans les abysses de la Guerre Froide. Aujourd'hui, on s'attaque à un monument du film de sous-marin, un thriller d'espionnage qui sent bon la paranoïa des années 80 et le son du sonar: A la poursuite d'Octobre Rouge (The Hunt for Red October en VO), sorti dans nos salles obscures françaises le 12 septembre 1990. Trente ans plus tard, le film de John McTiernan n'a pas pris une goutte d'eau. Accrochez-vous, on plonge !
A l'origine, il y a un livre. Pas n'importe lequel: le tout premier roman d'un certain Tom Clancy, agent d'assurance le jour et écrivain la nuit. Octobre Rouge est un "techno-thriller", un pavé ultra-détaillé sur la technologie militaire et les stratégies géopolitiques. Autant dire, pas le truc le plus facile à adapter au cinéma. C'est le producteur Mace Neufeld qui tombe sur le bouquin et qui y voit un potentiel énorme. Le problème ? Hollywood est sceptique. Un film avec des sous-marins, des Russes qui parlent anglais et des tonnes de dialogues techniques ? Pas très sexy sur le papier. Mais Neufeld s'accroche et réussit à convaincre les studios Paramount.
En 1984, l'URSS lance un sous-marin de conception révolutionnaire. Tous les services secrets américains sont sur les dents. Le capitaine Ramius, l'as de la marine soviétique, chargé des premiers essais en mer, exécute l'officier politique chargé de la surveillance du bâtiment et met le cap sur les Etats-Unis. Les marines des deux grandes puissances sont à sa poursuite, et personne ne connait ses intentions : revanche, provocation, geste de démence ou de paix ?
AlloCiné | A la poursuite d'Octobre Rouge
Pour réaliser ce thriller complexe, la production fait appel à l'homme qui monte : John McTiernan. Et c'est un choix brillant. Le monsieur sort tout juste des succès de Predator et, surtout, de Piège de Cristal (Die Hard). McTiernan, c'est le roi de l'action intelligente, le maestro de la tension en espace clos. Qui de mieux pour nous enfermer dans une boîte de conserve à 400 mètres sous la surface ?
Pour le casting, la production vise haut. Sean Connery hérite du rôle du Commandant Marko Ramius. L'acteur écossais apporte une gravité et un charisme immédiats au personnage. On lui pardonnera volontiers son accent, plus proche des Highlands que de Mourmansk. Il EST le capitaine Ramius, et on ne discute pas. Face à lui, le jeune Alec Baldwin incarne Jack Ryan. C'est la première apparition du personnage de Tom Clancy à l'écran. Baldwin campe un Ryan cérébral, un analyste de la CIA plus à l'aise derrière un bureau que sur le terrain, propulsé au cœur de la crise. Un choix parfait pour ce premier volet. Le reste du casting est un sans-faute: James Earl Jones, Sam Neill, Scott Glenn, Tim Curry... que du beau monde pour donner vie à ces militaires et technocrates au bord de la crise de nerfs.
La grande force du film, c'est sa mise en scène. McTiernan transforme les coursives étroites des sous-marins en véritables arènes dramatiques. Le réalisateur utilise l'espace comme personne. Les intérieurs sont claustrophobiques, les plafonds sont bas, les hommes sont les uns sur les autres. La caméra, toujours en mouvement, crée un sentiment d'urgence permanent. Le montage alterné entre les différents sous-marins et les salles de crise à Washington est un modèle du genre, faisant grimper la tension à chaque seconde.
Le directeur de la photo, Jan de Bont (futur réalisateur de Speed), a eu une idée de génie. Pour différencier les intérieurs, le sous-marin américain USS Dallas est baigné d'une lumière bleue et froide, tandis que l'Octobre Rouge soviétique est plongé dans une ambiance rougeoyante et chaude. C'est simple, visuel, et ça fonctionne à merveille.
Le film transpire l'authenticité. Le jargon militaire, les procédures, la discipline à bord... tout semble vrai. La coopération avec l'U.S. Navy a permis un niveau de détail rare, qui immerge totalement le spectateur.
Comment faire parler des Russes en anglais sans que ça paraisse ridicule ? McTiernan a trouvé la parade. La première scène à bord de l'Octobre Rouge est en russe. Puis, un officier politique lit un passage de la Bible, la caméra zoome sur le mot "Armageddon"... et quand elle dézoome, les personnages parlent anglais. Le public a compris la convention, le tour est joué. Malin !
Les impressionnants décors des intérieurs des sous-marins étaient montés sur des systèmes hydrauliques géants pour simuler les mouvements de tangage et de roulis. Les acteurs étaient secoués pour de bon ! L'intérieur de l'Octobre Rouge est un mélange de plusieurs types de sous-marins russes, et celui de l'USS Dallas combine des éléments de différentes classes de sous-marins américains pour un rendu plus cinématographique.
Comment parler du film sans mentionner la musique de Basil Poledouris ? Le thème principal, Hymn to Red October, est tout simplement légendaire. Des chœurs russes puissants et graves qui semblent sortir des profondeurs de l'océan. Cette musique n'accompagne pas seulement l'action, elle incarne la puissance, la majesté et la mélancolie de l'empire soviétique. C'est l'un de ces scores qui vous donnent des frissons à chaque écoute.
A sa sortie, A la poursuite d'Octobre Rouge est un triomphe. Il est salué par la critique pour son intelligence, sa tension et sa réalisation impeccable, et c'est un énorme succès au box-office. Plus de trente ans après, le film n'a rien perdu de sa force. Il a lancé la franchise cinématographique Jack Ryan (qui sera ensuite incarné par Harrison Ford, Ben Affleck et Chris Pine) et a établi un standard pour le techno-thriller et le film de sous-marin. Pour beaucoup de fans et de critiques, il reste le meilleur film de la saga et l'un des plus grands thrillers de la fin du XXe siècle.
A la poursuite d'Octobre Rouge est bien plus qu'un simple film d'action. C'est un jeu d'échecs géopolitique sous-marin, un suspense haletant porté par des acteurs impeccables et une réalisation d'une maîtrise absolue. Un film à voir et à revoir, en retenant son souffle.
##002878##Je pensais à une autre hypothèse de travail qu'il me semblerait utile d'examiner. Ramius cherche peut-être à passer à l'Ouest.
Jack Ryan interprété par Alec Baldwin | A la poursuite d'Octobre Rouge