Cani-bale
02 nov. 2025Quand on fuit l'avenir, on ne peut plus se réfugier que dans le passé.
Stephen King | Cujo
Stray Dogs #TPB de Forstner et Fleecs (Couverture bis de Stan Yak).
Dans le comic book Stray Dogs #TPB (Forstner et Fleecs • Image Comics) le cover artist Stan Yak parodie l'affiche du film d'horreur Cujo de Lewis Teague sur une des nombreuses couvertures alternatives de la BD.
Ah, les années 80... Une décennie bénie pour le cinéma d'horreur et pour les adaptations de Stephen King. Parmi les pépites angoissantes de cette époque, il y a un film qui a traumatisé toute une génération de propriétaires de chiens et d'enfants un peu trop curieux. Sorti en salles en août 1983, Cujo de Lewis Teague reste, plus de 40 ans après, une référence du film de "monstre" réaliste. Oubliez les vampires et les fantômes, ici, la terreur à quatre pattes, une fourrure adorable et une très, très mauvaise humeur. Alors, installez-vous confortablement et vérifiez que le chien du voisin ne bave pas de manière suspecte, on décortique ensemble cette petite merveille de tension.
A l'origine, Cujo est un roman de Stephen King publié en 1981. Fait amusant, King lui-même avoue n'avoir que de vagues souvenirs de l'écriture du livre, rédigé durant une période de forte consommation d'alcool. Le roman est dense, mêlant la déchéance du chien à une crise familiale profonde (adultère, doutes, peurs enfantines). Pour l'adaptation au cinéma, les scénaristes Don Carlos Dunaway et Lauren Currier ont fait un choix judicieux: simplifier. Ils ont élagué une partie du drame familial et surtout, supprimé les éléments les plus étranges du livre où le fantôme d'un tueur en série semble posséder le chien. Le film se concentre sur l'essentiel: une mère, son fils, une voiture en panne, et un Saint-Bernard de 90 kilos transformé en machine à tuer par la rage. Le résultat est un scénario plus direct, plus viscéral, qui transforme une tragédie psychologique en un pur survival.
Triste jour pour Donna (Dee Wallace) et son fils Tad (Danny Pintauro). Leur voiture est tombée en panne au beau milieu d'une cour déserte. Les secours arrivent sous la forme d'un Saint-Bernard enragé qui les assaille inlassablement.
AlloCiné | Cujo
Pour mettre en scène cette histoire, la production se tourne vers Lewis Teague. Ce n'est pas un inconnu dans le genre "créature qui tourne mal", puisqu'il a déjà réalisé L'Incroyable Alligator (1980). Teague a le sens du rythme et sait comment faire monter la pression, un talent essentiel pour ce qui allait devenir un huis clos automobile étouffant.
Dee Wallace, déjà une icône du genre après ses rôles dans La Colline a des yeux et surtout E.T. l'extra-terrestre, elle est le cœur du film. Sa transformation de mère de famille un peu perdue en lionne prête à tout pour sauver son enfant est absolument poignante. On souffre avec elle, on suffoque avec elle. Et le jeune acteur, Danny Pintauro, livre une performance bluffante de terreur enfantine. Ses crises de panique et sa détresse rendent le danger encore plus palpable.
Là où Cujo excelle, c'est dans sa mise en scène. Lewis Teague et son directeur de la photographie, un certain Jan de Bont (futur réalisateur de Speed et Twister !), ont eu des idées de génie. Dès la scène d'ouverture, la caméra adopte un point de vue bas, presque au ras du sol, nous mettant littéralement dans la peau du chien qui chasse un lapin. Cette approche subjective nous fait ressentir l'animalité avant même que la folie ne frappe.
Le film est coupé en deux: une première partie qui installe calmement les personnages et la menace latente, puis une seconde moitié qui est un tour de force de suspense. Pendant près de 45 minutes, l'action se concentre sur la Ford Pinto en panne, assiégée par Cujo. Teague utilise l'espace confiné de la voiture pour créer une claustrophobie intense. La chaleur, la déshydratation, les assauts répétés du chien... tout est filmé avec une brutalité sèche qui glace le sang. La photographie de de Bont, baignée d'une lumière d'été écrasante, renforce ce sentiment d'enfermement et d'épuisement.
La bande-son de Charles Bernstein accompagne parfaitement le film, passant de thèmes presque bucoliques à des compositions atonales et angoissantes lors des attaques du chien.
Le rôle de Cujo n'a pas été tenu par un seul chien, mais par une équipe de cinq Saint-Bernard, un rottweiler (pour certaines scènes d'attaque), une tête mécanique et même... un homme dans un costume de chien (l'acteur Gary Morgan) ! Les Saint-Bernard étaient si gentils et joueurs qu'ils n'arrêtaient pas de remuer la queue de joie pendant les prises. L'équipe a dû utiliser des astuces, comme attacher leur queue à leur patte, pour les empêcher de paraître trop amicaux.
A sa sortie, Cujo a reçu un accueil critique mitigé, mais a été un succès public honorable, devenant le quatrième film d'horreur le plus rentable de 1983. Si certains critiques lui reprochaient sa simplicité, c'est précisément cette qualité qui lui a permis de traverser les décennies. Aujourd'hui, Cujo est considéré par beaucoup comme un classique du genre et l'une des meilleures adaptations de Stephen King. Pourquoi ? Parce qu'il puise dans une peur fondamentale et universelle: la trahison de ce qui est censé être familier et bienveillant. Le chien de famille, symbole de loyauté, devient une menace imprévisible et mortelle.
Le film n'a pas besoin d'effets spéciaux grandiloquents pour terrifier. La performance incroyable de Dee Wallace, la tension insoutenable du siège et l'efficacité de la réalisation suffisent à en faire une expérience éprouvante. Son influence se ressent encore dans de nombreux films de survival qui ont suivi. Alors, si vous ne l'avez jamais vu, donnez-lui sa chance. Mais ne soyez pas surpris si la prochaine fois que vous croiserez un Saint-Bernard, vous changez discrètement de trottoir. Juste au cas où.
##002882##Mais avec le lycée commençait le moment des choix irrévocables. Les portes se fermaient alors avec un petit déclic qu'on ne percevait distinctement que bien des années plus tard, lors de rêves amers.
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