La courtisane est une institution si elle est un besoin.

Honoré de Balzac

Madame Rimsky-Korsakov de Franz Xaver Winterhalter conservé au musée d'Orsay (1864).
Madame Rimsky-Korsakov de Franz Xaver Winterhalter conservé au musée d'Orsay (1864).

Madame Rimsky-Korsakov selon Félix Meynet.
Ex-libris Détours au musée de Félix Meynet.

Avec cet ex-libris de l'artbook Détours au musée (Meynet • Fabard Edition) Félix Meynet parodie le tableau Madame Rimsky-Korsakov de Franz Xaver Winterhalter. Ici, Varvara Rimsky-Korsakov prend les traits d'Uma, l'héroïne de la série BD Les Eternels (Meynet et Yann • Dargaud).

 

Le Second Empire marque les esprits en France par sa cour royale qui vit dans une certaine exubérance, où les bals se mêlent aux réceptions officielles, dans des tournoiements de crinoline et de regards chargés de sous-entendus. Franz Xaver Winterhalter (1805-1873) est un peintre allemand contemporain de cette période mouvementée, et en est un des portraitistes les plus en vogue. Des portraits officiels aux plus intimes, tous les aristocrates d'Europe souhaitent avoir le leur.

Fille d'un riche marchand de Kostroma, Varvara Dmitrievna Mergassov (1833-1878) se marie à seize ans avec un comte russe nommé Nicolai Sergueevitch Rimsky-Korsakov. La famille Rimsky-Korsakov est très connue à Moscou car elle y organise de nombreux bals. Mais les choses changent avec l'éclatement de la Guerre de Crimée. L'époux part à la guerre et en revient totalement bouleversé, c'est le début de la fin pour le jeune couple. Ils se séparent au début des années 1860, Varvara part alors vivre en France. Elle se lie d'amitié avec la comtesse de Castiglione et entre en même temps qu'elle à la cour des Tuileries et, comme elle encore, fait partie des maîtresses de l'empereur Napoléon III. Elle devient célèbre pour ses tenues extravagantes qu'elle porte lors des bals. Son costume tiré de Salammbô de Flaubert, porté lors d'un bal de l'hiver 1863, reste dans les annales. Sa beauté ne fanant pas avec les années fait qu'on lui donne le surnom de "Vénus tartare". Après la chute de l'Empire, elle part vivre à Nice où elle décède le 18 décembre 1878.

Avec ce tableau, Madame Rimsky-Korsakov, soit disant destiné à son mari bien que plus probablement adressé à un amant, on retrouve tout le talent de Winterhalter par le teint délicat, le vêtement précis et la chevelure détaillée. Il met en scène un arrêt sur image d'un mouvement vif, transformant le spectateur en voyeur. En effet, Varvara semble surprise. Sa tête tournée porte son regard vers un endroit en dehors du tableau et elle pose sa main gauche sur le dossier d'une chauffeuse, seul élément mobilier présent, comme si elle avait bougée brusquement. De sa main droite, elle retient sa chevelure dénouée mais aussi son peignoir tombant qui laisse distinguer les formes d'un corset et d'une cage de crinoline. On peut donc situer ce moment lors de l'élaboration d'une coiffure grâce à la présence de ce dit peignoir à coiffer.

Cette Huile sur toile mesure 117 centimètres sur 90 centimètres. Elle est payée 9000 francs par madame Varvara Rimsky-Korsakov à Franz Xaver Winterhalter. Le tableau fait partie de la Collection Rimsky-Korsakow jusqu'en 1879. A cette date, Nicolas et Dimitry Rimsky-Korsakov, fils du modèle, en font don au Musée du Luxembourg. La même année, il est attribué au Musée du Louvre jusqu'en 1953. Puis de 1953 à 1986, il est déposé au musée national du Château de Compiègne. Et depuis 1986, il est conservé au Musée d'Orsay de Paris dans la salle 9 du rez-de-chaussée.

La courtisane est un mythe. Jamais une femme n'a inventé une débauche.

Gustave Flaubert | Lettre à Louise Colet

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